Société

Malgré le numérique, échanger de l’argent entre particuliers est toujours aussi galère

A partir d’une certaine somme, remettre de l’argent à un particulier s’avère compliqué ou cher. Pourquoi le numérique n’a-t-il pas encore fluidifié tout cela ?

L’autre jour, je vends mon vélo électrique sur LeBonCoin. Après la traditionnelle négociation de marchands de tapis avec l’acheteur (sur LeBonCoin, les acheteurs négocient toujours, par principe, sans se soucier de la valeur réelle du bien), nous nous mettons d’accord sur un prix : 1500 euros. C’est une somme. Se pose alors la question toute bête du moyen de paiement. Et là, c’est le drame.

Le Bon Coin ou Paypal : trop chers

Je suis tenté par le service de paiement intégré au site LeBonCoin, qui garantit à la fois l’acheteur et le vendeur, en se posant en tiers de confiance (si le bien n’est pas livré, le vendeur n’est pas payé et vice-versa). C’est un service à haute valeur ajoutée et je suis naturellement prêt à payer pour cela. Sauf que l’addition est bien trop salée. LBC prélève 4% du prix de vente, ce qui représente, pour mon beau vélo, la modique somme de 60 euros ! C’est quasiment le montant sur lequel a porté la négociation finale avec mon acheteur. Cela me paraît bien trop élevé pour la vente unique d’un objet entre particuliers. En plus, cette somme vient s’ajouter au prix déjà payé pour mettre l’annonce en avant, assurer sa visibilité, etc. Sans compter que je n’ai même pas besoin d’un tiers de confiance, puisque l’acheteur habite près de chez moi et que je vais lui remettre le vélo en mains propres. J’aurais donc seulement besoin qu’il puisse m’envoyer de l’argent, d’un clic sur son smartphone, après avoir essayé le vélo. Pour un tel service, j’aurais volontiers payé 1% (15 euros) mais certainement pas 4%. Question de principe.

Je cherche alors des solutions équivalentes, permettant de transférer 1500 euros d’un particulier à un autre, sans y laisser trop de plumes.

Paypal ? Le service est à peu près équivalent à ce que propose LeBonCoin et, malheureusement, la commission s’élève encore à plus de 50 euros pour mon cher vélo.

Lydia ou Paylib : trop compliqués

Lydia ? C’est gratuit mais on ne peut transférer que 250 euros tous les 30 jours, ou bien 2500 euros à condition d’avoir un compte certifié. Un compte certifié ? Mon acheteur, de bonne volonté, se renseigne mais cela implique une procédure lourdingue et non instantanée, surtout un week-end.

Je fouille Google à la recherche de solutions alternatives. Des tas de services vantent chacun leurs qualités, mais aucun ne répond réellement à ma problématique.

Paylib entre amis (la solution des banques françaises) ? A priori, c’est gratuit mais plafonné à quelques centaines d’euros, sauf avec certaines banques. Evidemment, ma banque n’est pas compatible (en plus, l’acheteur bien que sympathique, n’est pas mon “ami”). Exit Paylib.

Pour des raisons de lutte contre le blanchiment d’argent, les limites de transfert d’argent entre particuliers ont été considérablement abaissés ces dernières années, et ce qui pourrait être simple est rendu extrêmement compliqué pour les citoyens lambda.

Que reste-t-il ?

Chèque ou virement : pas sûr, trop lourdingue

Il reste à envisager deux méthodes d’avant-guerre.

Par chèque ? Pas question, car il y a toujours un risque pour le vendeur (chèque en bois), comme pour l’acheteur (défaut de livraison du bien le temps d’encaisser le chèque).

Par virement bancaire ? Cela oblige à échanger des informations bancaires avec une personne inconnue. En plus, c’est long. Seules quelques banques pratiquent l’instant payment, c’est-à-dire le virement immédiat.

Il ne reste que le cash, à l’ancienne

Au bout du rouleau, nous arrivons à la conclusion, l’acheteur et moi-même, qu’il n’y a plus qu’une seule solution : le cash. Pour moi qui essaye à tout prix de sortir le cash de ma vie quotidienne, c’est un renoncement. En plus, cela va m’obliger à aller le déposer dans une agence bancaire, lieu insolite où je n’ai pas mis les pieds depuis des années.

Mais bon, soit.

Nous envisageons de nous rencontrer immédiatement puisque nous habitons tout près l’un de l’autre.

Problème, l’acheteur n’a pas assez d’espèces. A cause des plafonds de retraits, il a besoin d’au moins trois jours pour réunir la somme complète. Zut. C’est néanmoins la solution que nous retenons. Mais cela va prendre du temps.

Une semaine plus tard, le temps de trouver un créneau qui nous convienne à tous les deux pendant le week-end, nous parvenons enfin à effectuer la transaction. Voilà comment nous nous retrouvons à échanger des liasses billets sur un coin de trottoir, comme des trafiquants de drogue.

Conclusion

A l’aube du XXIè siècle et malgré les innombrables innovations numériques dans le domaine financier et bancaire, il n’existe toujours pas de moyen simple et bon marché pour procéder à des transactions honnêtes entre particuliers. Seuls les “vieux” moyens de paiement d’un autre âge permettent de conclure une affaire à moindre coût. Ne parlons même pas d’échange d’argent d’un pays à un autre…

On comprend mieux pourquoi des acteurs comme Facebook envisagent de lancer leur propre monnaie virtuelle, histoire d’introduire un peu de modernité et de fluidité fiduciaire dans ce monde archaïque.

Afin d’éviter que ce soit encore un GAFAM qui remporte la mise, ne serait-il pas temps que des acteurs européens inventent des solutions réellement adaptées aux besoins des particuliers ?

(PS : si vous connaissez le service miracle qui m’aurait échappé, faites signe !)

12 réflexions sur “Malgré le numérique, échanger de l’argent entre particuliers est toujours aussi galère

    • Oui, Revolut est très bien mais ouvrir un compte juste pour effectuer une seule transaction n’est pas vraiment ce qu’on appelle un moyen simple…

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    • fabnet

      Et les virements SEPA instantanés ? Problème de plafonds ?

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  • Thibault

    Peu d’effort ont était fait dans cette transaction en fait 🙂

    – PayPal permet de régler sans frais si on sélectionne la méthode “entre proches / entre amis” et sans limite de montant.

    – Revolut permet le paiement instantané

    – N26 permet le paiement instantané

    – Le virement instantané demande l’échange de RIB. Communiquer un RIB est absolument sans danger (contrairement à ce que pense la majorité).
    La limite actuelle sur le virement instant sont les montants selon certaines banques. Mais c’est vraiment le futur et beaucoup de banques l’ont mis en place.

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    • Merci pour votre commentaire.
      Je ne connaissais pas “Paypal entre proches” et il n’est pas apparu dans mes recherches. Je l’essayerai la prochaine fois.
      Pour les autre solutions (Revolut, N26, Virement bancaire classique) j’avoue les avoir écartées dès le départ en raison de la lourdeur apparente (créer un compte, délais de virements…) car je recherchais naïvement un système instantané.

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  • Thibault

    Et les frais Leboncoin sont à payer par l’acheteur et non le vendeur ce qu’on comprend dans ce post.

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  • Thibault

    Et je rajouterais que moi je ne fais plus aucune transaction par cash car le risque de faux billets est plus élevé, à moins d’aller au distributeur en direct avec la personne et qu’il ne fasse pas un tour de passe passe 🙂

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  • Benoît

    Je partage ce constat.
    Neanmois, le virement instantané me semble une bonne solution.
    Il ne coute en général que quelques dizaines de centimes d’euros pour l’émetteur, ou bien est complètement gratuit chez certaines banques (ex : Boursorama, sous un plafond de 2000€).
    C’est un standard européen ; toutes les banques européennes devraient y passer à terme.
    Mais subsiste la problématique du partage des coordonnées bancaires, même s’il ne présente pas de risque majeur.

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    • Benjamin

      En Belgique, la plupart des applications mobiles des grandes banques permettent de générer un QR Code. Celui-ci une fois scanné avec une autre appli bancaire pré-remplis les informations de virement (montant, compte bancaire, communication,…) et permet à l’utilisatuer de simplement confirmer le paiement à l’aide de son mot de passe.
      C’est extrêmement pratique pour les notes de resto à partager entre amis par exemple. Un des convives paie la note et génère ensuite un QRCode à scanner apr les autres qui lui remboursent alors instantanément (plus besoin de réclamer les sous à l’ami qui à la facheuse tendance à oublier de rembourser les autres 😉 ).
      Cela solutionne par la même occasion, le problème des paiements entre particuliers.

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  • Benjamin

    En Belgique, les applications mobiles des principales banque permettent de générer un QR Code lisible dans les mêmes applications et permettant de réaliser des virements instantanés, l’émetteur ayant directement la confirmation de la bonne exécution du paiement.
    Quelle facilité pour diviser la note à la fin d’un resto ou pour faire des paiements entre particuliers!

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